Le 20 juillet, j’eus le malheur de perdre M. David Nelson qui mourut d’une fièvre inflammatoire.
Je le regrettai infiniment ; il s’était acquitté avec beaucoup d’attention et d’activité de l’objet de sa mission et je l’avais toujours trouvé prêt à seconder toutes mes idées pour le bien du service que nous avions à remplir. Il avait été fort utile aussi sans cette dernière traversée jusqu’à Timor, pendant laquelle il m’avait donné beaucoup de satisfaction, par le courage et la patience dont il avait donné l’exemple.
Le 21 juillet : j’employai cette journée à assister aux funérailles de M. Nelson. La bière fut portée par douze soldats vêtus de noir, précédés par le ministre. Je marchais ensuite, accompagné du gouverneur en second ; après nous, venaient dix habitants de la ville et les officiers des vaisseaux qui étaient dans le port, et enfin mes propres officiers et mon équipage.
Après avoir lu les prières et l’office de l’enterrement, le corps fut inhumé derrière la chapelle, dans le cimetière appartenant aux Européens de cette ville ; je fus bien affecté de n’avoir pu me procurer une pierre pour pouvoir mettre, avec une inscription, sur sa tombe.
C’était le second voyage de M. Nelson dans la mer du Sud ; il avait été du dernier voyage du capitaine Cook où M. Banks l’avait employé pour lui faire une collection de plantes, graines et objets d’histoire naturelle ; et voilà qu’après avoir fait le plus difficile, plein de reconnaissance envers la Providence et au moment où il s’y attendait le moins, la nature lui demande son tribut.
Je m’embarquai le 20 août, après avoir pris congé cordialement de mes excellents hôtes ; nous fîmes voile du port de Coupang, en nous saluant réciproquement avec le fort et les bâtiments qui étaient au mouillage. M. Van Este était expirant au moment de mon départ. Nous devons à ce gouverneur les témoignages les plus vifs de reconnaissance, pour les procédés et les attentions dont il nous a comblés, malgré l’état fâcheux de sa santé. Il est malheureux de ne rendre ce tribut qu’à sa mémoire. Nous avons eu également à nous louer de M. Wanjon, second du gouverneur qui, non moins humain et non moins disposé à nous rendre service, n’a cessé de nous obliger ; et qui lorsque je trouvai de l’embarras à me procurer des fonds de la part du gouvernement pour pouvoir acheter un bâtiment, me le fit avoir sur son propre crédit. Sans ce secours essentiel, il est certain que j’aurais manqué l’occasion de la flotte de Batavia pour l’Europe au mois d’octobre. Je n’ai d’autre moyen de reconnaître tant de bienfaits, que mes sentiments et l’éternel souvenir que j’en conserverai.
M. Max, chirurgien de l’endroit, s’est comporté avec nous de la manière la plus obligeante et la plus généreuse ; il donna ses soins à tous, et lorsque je voulus lui faire accepter un paiement ou lui demander un compte, je ne pus obtenir de lui, pour toute réponse, sinon qu’il n’avait fait que son devoir.
Coupang est situé par les 10° 12′ de latitude sud et par 124° 41′ de longitude est du méridien de Greenwich.
Le 29 août, je passai à l’extrémité occidentale de l’île de Flores, à travers un détroit fort dangereux, semé d’îles et de rochers. Lorsque j’eus atteint 8° de latitude sud, je fis route à l’ouest et passai les îles de Sombava, Lomboc et Bali ; enfin j’atterrai sur Java le 6 septembre. Je continuai alors de faire route à l’ouest par le détroit de Maduré.
Le 10 septembre, je mouille devant Passourouang, par 7° 36′ de latitude sud et à 1° 44′ en longitude, à l’ouest du cap Sandana qui est à l’extrémité du N. E. de l’île de Java.
J’appareillai le 11 et j’arrivai le 13 à Soutabia, par 7′ 11′ de latitude sud et 1° 52′ de longitude ouest du cap Sandana.
Le 17 septembre, je fis voile de Soutabia et je mouillai même jour à Crissey d’où je repartis après y avoir séjourné deux heures. La latitude de Crissey est de 7′ 9′ sud et la longitude 1° 55′ ouest du cap Sandana. Ayant dirigé ma route vers Samosang, j’y mouillai le 22 septembre. La latitude de Samosang est de 6° 54′ sud, sa longitude 4° 7′ ouest.
Le 26 du même mois, j’appareillai de là pour Batavia où je mouillai le premier octobre ; sa latitude est de 6° 10′ sud et sa longitude 8° 12′ à l’ouest de l’extrémité la plus orientale de l’île de Java.
Le lendemain de mon arrivée, ayant eu quelques fatigues à essuyer pour parvenir à négocier le débarquement de mes gens qui étaient restés à bord de la goélette, mouillée dans un endroit malsain de la rivière, je fus saisi d’une forte fièvre.
Le 7, on me transporta à la campagne chez le principal médecin, où le gouverneur général me fit dire que je trouverais toute sorte de secours et de soins, et c’est à cela que je dois mon rétablissement. Il me devint cependant indispensable de m’éloigner de Batavia sans délai ; et le gouverneur me donna en conséquence la permission de m’embarquer avec me donna en conséquence la permission de m’embarquer avec. Il m’assura qu’il ferait partir les autres peu après moi, dans la flotte dont le départ était fixé pour tout le courant de ce mois. Il m’observa que j’exposerais beaucoup ma santé à rester plus longtemps dans cet endroit et que d’ailleurs il lui était impossible de nous donner passage à tous dans le même vaisseau. Il était donc essentiel de partir tout de suite, quand même ma santé ne l’aurait pas exigé. En conséquence, je m’embarquai sur le paquebot le Vlydt qui appareilla le 16 octobre.
Le 16 décembre, j’arrivai au cap de Bonne-Espérance où je commençai à sentir le retour de ma santé ; quoique j’aie encore après continué d’être faible et languissant.
Le gouverneur général de l’île de Java et toutes les personnes qui y occupent des emplois, m’ont comblé d’honnêtetés et d’attentions ; j’ai reçu aussi mille politesses et des marques de la plus sincère affection de la part de M. Van de Graaf, gouverneur du cap de Bonne-Espérance. Nous partîmes du cap pour l’Europe le 2 janvier 1790 ; et le 14 mars, je fus mis à terre à Portsmouth par un bateau de l’île de Wight.